Le concept suisse de bien commun repose sur la perception que chacun a du bien commun et l’enracine dans les besoins humains fondamentaux.
Présentation de la méthode
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On n’a pas le droit d’ignorer le bien commun.
—Prof. Dr. Hans Maier, politologue, journaliste et homme politique
Le bien-être de l’individu dépend aussi du bien commun. L’homme est un être social qui dépend de son environnement pour se développer comme individu et y trouver la reconnaissance et le soutien dont il a besoin. Dans une société qui fonctionne, le bien commun est le lien qui soude la communauté et qui sert de référence à l’individu pour la résolution des conflits et le partage des ressources. C’est ainsi que le bien commun incarne à la fois une idée de ce qui doit être commun à tous et de ce qui caractérise l’identité profonde d’une société.
La question du bien commun permet de savoir comment les citoyens perçoivent leur environnement social. Le bien commun existe à partir du moment où un individu expérimente de façon positive la communauté sociale. Cette idée repose sur le principe philosophique que la valeur attribuée à un objet est le résultat de l’évaluation positive de cet objet par le sujet évaluateur. Dans le cas du bien commun, c’est l’individu qui évalue la communauté. Or, dans nos sociétés modernes, l’expérience de l’existence de la communauté est largement influencée par les organisations les plus diverses. C’est ainsi que, par exemple, un club de foot peut contribuer à la cohésion d’une ville ou une banque à l’évolution économique d’un pays en accomplissant leur rôle dans leur domaine-clé.
Toutes ces contributions au bien commun confortent l’idée que le bien commun n’existe que quand il est présent dans la tête et le cœur des gens. Cela implique aussi que les faits seuls ne suffisent pas. Le bien commun n’existe que lorsque les actes d’une organisation sont perçus par les individus comme positifs. Cela explique que le bien commun ne puisse pas être déterminé a priori, mais qu’il résulte d’un ordre spontané. L’arrière-plan culturel et sociétal dans lequel le bien commun est ancré détermine les valeurs qui sont réellement importantes.
Qu’est-ce qui fait qu’un individu considère qu’une organisation contribue au bien commun? La perception et l’évaluation de la communauté sont des processus psychologiques dans lesquels entrent des facteurs aussi bien cognitifs et rationnels qu’inconscient et émotionnels. Pour procéder à une évaluation, nous faisons appel à l’idée que nous nous faisons de nos besoins fondamentaux et nous nous en servons pour ainsi dire de jauge. Lorsque ces besoins sont satisfaits, notre évaluation est positive, lorsqu’ils ne le sont pas, notre évaluation est négative.
Le psychologue américain, Seymour Epstein, a défini au cours d’une étude comparative quatre besoins humains fondamentaux sur lesquels reposent les quatre dimensions du bien commun (cf. Meynhardt, 2009):
En tant qu’individu, nous aspirons à comprendre le monde qui nous entoure pour pouvoir anticiper les rapports de cause à effet. Ce besoin est associé à la nécessité de nous orienter dans notre environnement et de le comprendre dans ses relations de causalité dans le but ultime de maintenir ou élargir notre propre champ d’action. Evaluer un acte signifie, de ce point de vue, évaluer son utilité pour atteindre un objectif. L’objet de l’évaluation est un rapport entre la fin et les moyens. Cette réflexion repose sur des critères des valeurs instrumentales et utilitaristes. (La valeur instrumentale- utilitariste représente le lien conceptuel envers un concept de valeur économique lequel assimile la notion de valeur aux critères financiers et économiques. Cependant, la valeur mesurée en unités monétaires ne traduit pas une valeur que l’on puisse relier au sens étroit du terme aux besoins humains fondamentaux à moins qu’elle soit spécifiquement utilisée comme valeur instrumentale et utilitariste). Le critère d’évaluation de la valeur instrumentale et utilitariste se focalise de manière générale sur un bénéfice immédiat. Selon ce critère, une organisation concourt au bien commun quand elle effectue, d’après l’observateur, un bon travail dans le cadre de son activité principale. L’organisation remplit son rôle lorsqu’elle apporte par ses produits et ses prestations un bénéfice perceptible à l’observateur.
Les individus aspirent à la reconnaissance et à la cohésion au sein d’une communauté sociale. Ils recherchent un sentiment d’appartenance et d’identité à un groupe tout en maintenant un rapport équilibré entre distance et proximité. Le besoin d’interactions humaines positives découle de la « nature sociale » de l’Homme. Il s’agit plus d’un besoin de reconnaissance des liens sociaux tissés par l’individu que d’un besoin de reconnaissance de sa personne morale. L’accent est mis sur l’appartenance à un groupe et à l’expérience qui y est liée. De ce point de vue, le critère d’évaluation dominant est de nature politico-sociale et comprend des valeurs comme la solidarité, la coopération, mais aussi le pouvoir, la conscience de la place qu’on occupe dans le groupe et l’identité de ce groupe. Les organisations contribuent à cette dimension politico-sociale lorsque par leur action et leur image elles concourent, aux yeux de l’observateur, à une cohésion plus grande dans la communauté.
Nous aspirons à faire des expériences émotionnelles positives et à éviter la souffrance. L’objectif poursuivi par ce besoin est dans un premier temps d’éviter de manière très générale la souffrance et de faire des expériences positives. Ce besoin très profondément ancré dans l’évolution humaine vise à assurer la survie de l’organisme et de ses moyens de subsistance et a été transformé par la culture en soif de plaisirs, voire même en besoin d’expériences esthétiques. Ce critère d’évaluation fondamental débouche sur des valeurs hédonistes et esthétiques qui mêlent la sécurité, la beauté, le plaisir, la joie et, d’une manière générale, le bien-être et la sensation du bonheur ; des valeurs qui trouvent au niveau collectif une grande variété d’expressions. Les organisations concourent à ces valeurs en améliorant, aux yeux de l’observateur, sa qualité de vie et en lui permettant de faire des expériences positives.
Les individus aspirent à avoir une image et une estime d’eux-mêmes positives. Ils veulent être considérés comme individus à part entière et être traités de façon juste. Ce besoin se focalise sur leur perception comme personne humaine et donc comme individu. Ce critère est considéré comme une valeur morale et éthique puisque, dans un environnement social, elle permet de répondre à la question de savoir si un acte ou une décision concourent à plus d’égalité ou d’inégalité entre les individus ou si quelque chose est valable ou pas pour tous (dans un cadre défini au préalable). Un acte est donc toujours considéré comme moral (« décent ») lorsqu’il ne porte pas atteinte, confirme ou même renforce notre sentiment personnel de justice. Lorsqu’une personne fait l’expérience de l’existence d’une divergence entre ce qu’elle considère comme convenable, juste ou décent et ce qu’elle vit, cela blesse ses sentiments émotionnels-motivationnels et elle considère cette divergence comme « immorale ». Cette évaluation est toujours effectuée en fonction de la façon dont la personne se perçoit, donc à l’aune de son estime de soi et de son amour propre. Les droits de l’Homme, la dignité humaine ou encore l’autonomie de l’individu sont les valeurs morales et éthiques essentielles présentes au niveau collectif et sociétal. Elles aident à déterminer ce qui fait qu’une personne est un être humain lorsque son individualité et la perception qu’elle a d’elle-même sont en question. Les organisations créent de la valeur dans cette dimension centrée sur l’individu lorsqu’elles se comportent de manière morale et décente aux yeux de l’observateur et peuvent renvoyer à l’individu une estime de lui-même positive. C’est la base de la dimension morale.
Le résultat des recherches menées en psychologie indique que ces quatre besoins ne peuvent pas être hiérarchisés et qu’ils doivent être considérés sur un pied d’égalité. C’est ce qui explique que ces quatre dimensions aient le même poids dans le score du bien commun. Comme le bien commun dépend de la perception de l’observateur, nous donnons la possibilité à l’utilisateur du site de donner à l’une ou l’autre dimension du bien commun une importance plus grande qu’aux autres. L’utilisateur peut à l’aide d’un curseur déterminer lui-même les critères de présentation de son classement et laisser s’exprimer ainsi ses préférences personnelles.
Les quatre dimensions du bien commun
Lorsque le bien commun est compris en ces termes, les organisations jouent un grand rôle dans la création du bien commun. Dans ce cas, contribuer au bien commun dans le sens de créer de la valeur sociétal devient pour les chefs d’entreprise une perspective et variable de rendement importantes. Sous le concept de Public Value (cf. Wikipédia ), cette notion joue un rôle important dans la science administrative et la recherche en management (cf. Meynhardt et Gomez, 2013 ). Cette vision d’un bien commun ancré dans la subjectivité et dans les besoins humains fondamentaux et comme concept pouvant être influencé par les organisations trouve son origine dans la théorie du Public Value de Saint-Gall de Monsieur Meynhardt (cf. Meynhardt, 2008 ). La définition de la Public Value Creation de Monsieur Meynhardt en est une illustration supplémentaire:
Le Public Value est créé ou détruit dès l’instant où l’expérience et le comportement individuel de personnes ou d’un groupe subissent une influence et que cette influence a une action stabilisante ou déstabilisante sur leur évaluation de la cohésion sociale, leur expérience de la communauté et leur autodétermination comme individus dans leur environnement social. Le Public Value est donc le résultat de processus d’évaluation à caractère collectif et, dans ce sens, social qui ne se limitent pas seulement à l’individu.
Meynhardt, T. (2008). Public Value - oder: was heißt Wertschöpfung zum Gemeinwohl?, dms - der moderne Staat, 2, p. 457 à 468.